La consommation dans les quartiers informels

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En 2011, la population indienne était environ de 1,2 milliards de personnes. 70% vivait dans les campagnes (850 millions de personnes), les 30% restant vivait dans des zones urbaines (350 millions). L’Inde a une urbanisation particulièrement lente, mais la précarité régnant dans les campagnes incite les ruraux a chercher du travail en ville. Et où vont-ils la plupart du temps ? Dans les bidonvilles.

La démographie galopante au sein des bidonvilles incite les économistes et les entreprises à s’intéresser à ce marché. Vivant d’une manière mi-rurale, mi-urbaine, les habitants des bidonvilles connaissent – et subissent – les nombreuses tentations de la ville, en conservant un revenu bas et une manière de vivre assez traditionnelle.

A ce propos, une amie me racontait l’autre jour que, dans le train, une dame lui avait fermement recommandé de ne pas remonter sa jupe au dessus des genoux, en dépit de la chaleur et malgré le fait que le wagon était uniquement constitué de femmes. Cette dame respectable n’a sans doute pas du voir les affiches gigantesques qui pullulent sur les autoroutes de Mumbai, où les actrices de Bollywood déjà à moitié à poil semblent simuler le plus bel orgasme de leur vie dans des films tels que « Kamasutra 3D » (avec l’inénarrable Sherlyn Chopra) ou « Jism 2 » (mot qui signifie « corps » en hindi, mais aussi sperme en argot anglais – heureuse coïncidence?) avec l’ancienne star de films porno Sunny Leone.

Les simples affiches de ces films ouvertement érotiques excitent les mâles en chaleur qui se trouvent plongés dans une profonde rêverie pornographique – au meilleur des cas – à la vue d’un mollet, ou pire, d’une épaule.

Et même si le parallèle est un peu facile, on peut affirmer que les pubs affichant les courbes élégantes de produits inabordables pour les habitants de Mumbai produisent le même type d’effet que les poses lascives des actrices de Bollywood : envie, besoin, obsession.

C’est ça la consommation d’aujourd’hui, à Bombay comme ailleurs.

Bref, c’est une classe informelle qui se forme dans ces quartiers vivant et consommant différemment du reste de la ville : en effet, alors que le problème de se nourrir décemment se pose encore pour la plupart, le fait de détenir une télévision reste une des priorités numéro 1. Dans les graphiques ci-dessous, on voit que la consommation basique est supérieure dans les slums que dans le reste de l’Inde et équivalente aux zones urbaines « formelles ». Mais dés qu’il s’agit de chier en paix et de boire à volonté, les habitants de ces quartiers sont encore loin du compte.

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« L’émulation consumériste » est ainsi très élevée dans les slums du fait de l’influence très forte des habitudes de consommation de la ville formelle. Mais les biens de consommation sont ils adaptés aux habitudes de ces habitants ainsi qu’à leur portefeuille ? Pas nécessairement. Selon une étude de la Participatory Research Society of Asia, 41% des habitants des bidonvilles gagnent entre 5000 et 10 000 roupies chaque mois (entre 62 et 125 €) dont la moitié passe dans la nourriture. C’est très peu et ça les oblige à s’endetter lourdement lorsqu’ils veulent s’acheter leur sacro-sainte télé ou un portable intelligent.

Le marché de la consommation dans les bidonvilles est sûrement prometteur (mais pas nécessairement positif) : des gens avec un réel besoin de consommation, prêts à travailler dur et à s’endetter mais dont les revenus sont assez bas. Reste aux entreprises de savoir s’adapter aux besoins et aux possibilités des habitants de ces quartiers.

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